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PARTIE I
D / L’UNION EUROPÉENNE :
MODÈLE RÉDUIT DES RAVAGES
DU NÉOLIBÉRALISME
ET DE LA GLOBALISATION
Si les gouvernements successifs sont largement coupables de l’affaiblissement de la
capacité de réaction de la France face à la pandémie, la responsabilité de l’Union eu-
ropéenne est aussi clairement engagée. Elle l’est d’abord car les principes écono-
miques qui sont au cœur de la construction européenne ont organisé le démantèle-
ment de notre tissu industriel, réduisant par là même notre autonomie dans la
production de médicaments, d’équipements de santé ou de matériel de protection .
Elle l’est également car le processus de renforcement de son contrôle sur les choix
budgétaires des États membres s’est traduit par une pression toujours plus forte à la
mise en place de politique de compression budgétaire, affaiblissant l’ensemble des
services publics et en particulier le service public de la santé .
1 / L’EUROPE LIBÉRALE, MACHINE À DÉTRUIRE L’INDUSTRIE FRANÇAISE
L’Union européenne est une organisation internationale unique en son genre : elle se
démarque par le fait que ses traités (le Traité sur l’Union européenne et le Traité sur le
fonctionnement de l’Union européenne) ne se contentent pas d’organiser un cadre de
coopération et de créer des instruments de règlement des différends, comme la ma-
jorité des organisations internationales. L’Union européenne va au-delà puisqu’elle
sanctuarise en ses traités des choix et politiques économiques. Celles-ci sont déter-
minées dès l’article 3 du Traité sur l’Union européenne (TUE) : « une économie sociale
de marché hautement compétitive », fondée sur « sur une croissance économique
équilibrée et sur la stabilité des prix ». Elles définissent ce que l’on appelle « l’ordolibé-
ralisme » qui, contrairement au libéralisme classique, ne considère pas le marché
comme étant naturel et spontané : il doit être organisé par des règles que les pouvoirs pu-
blics sont chargés de garantir.
Nous pouvons donner ici quelques exemples de ces règles :
1) L’indépendance de la Banque Centrale Européenne (article 127 et 130 du TFUE) :
dans l’esprit des ordolibéraux, pour que l’offre et la demande puissent s’équilibrer
autour d’un prix adéquat il ne faut pas que les prix soient faussés par la politique
monétaire des États qui pourraient, par exemple, mener une politique expan-
sionniste pour répondre aux besoins d’un programme politique.
2) Le principe de la concurrence libre et non faussée : la Commission européenne
peut poursuivre ce qu’elle appelle les abus de position dominante (article 102)
ou contraindre les États membres à aménager leur législation pour permettre
l’émergence d’entreprises concurrentes (article 37). Suivant la même logique,
les États ne peuvent pas soutenir une entreprise ou un secteur en difficulté afin
de ne pas créer une distorsion de concurrence (article 107).
3) L’obsession du libre-échange : pour permettre un ajustement optimal, les res-
trictions aux mouvements des capitaux, des biens, des services et des personnes
ne peuvent exister au sein du marché unique (article 35 notamment) et doivent
disparaître afin de permettre le « développement harmonieux du commerce
mondial » (article 206).