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PARTIE II
2 / UNE EXPLOSION DES INÉGALITÉS ET RUPTURE D’ÉGALITÉ
ENTRE LES CITOYENS ET LES TERRITOIRES
La gravité de la crise sanitaire due au Covid-19 ainsi que la nature du virus et sa facilité
de propagation peuvent laisser penser que nous sommes tous égaux face au risque de
contamination. Mais on constate que selon les territoires et les individus, les risques
subis et les conséquences pesant sur chacun varient, faisant de cette crise un catalyseur
des inégalités sociales en France, qu’elle révèle et accroît gravement. Cette partie s’attache
à lister un certain nombre de ces inégalités.
En outre-mer, les populations font face à la crise du Covid-19 de façon différente en
fonction de leurs particularités . Dans les Antilles, par exemple, les populations sont
vieillissantes et subissent des pluripathologies (diabète, obésité ou insuffisances res-
piratoires, facteurs aggravants du Covid), dues à des problèmes préexistants. Partout,
les inégalités socio-économiques et les défaillances structurelles (sous équipement
sanitaire, manque d’infrastructures pour l’accès à l’eau, discontinuités territoriales, vie
chère, chômage élevé, protection sociale moindre, etc.) aggravent les effets de l’épidémie,
même quand elle semble relativement mieux ou bien contenue. Ces territoires ne sont
pas tous au même stade de développement de l’épidémie que le reste de la France .
À l’heure de la rédaction de ce rapport, la Guadeloupe a enregistré 155 cas et 13 décès,
la Martinique 189 cas et 14 décès, La Réunion 443 cas et aucun décès. En Guyane, 164
cas et un décès ont été enregistrés. La Nouvelle-Calédonie, où seulement 18 malades
ont été comptabilisés, a entamé son déconfinement le 4 mai. La principale préoccupation
porte sur Mayotte, où le nombre de cas connaît une forte progression : 1 258 cas et 16 décès
à la date du 15 mai, et où on redoute une explosion si l’épidémie se répand dans les
bidonvilles, alors même qu’une épidémie de dengue sévit déjà.
De manière générale, on constate de grandes disparités dans les vulnérabilités face
au virus, mises en évidence par les multiples auditions réalisées . Les personnes les
plus vulnérables au virus recoupent les catégories de population les plus précaires.
C’est ainsi que beaucoup de malades chroniques sont victimes d’une « triple peine »
dans cette crise sanitaire : la pauvreté est corrélée à une plus grande incidence d’obé-
sité, de diabète ou d’hypertension artérielle, qui sont des causes de comorbidités en
cas d’infection virale. Leurs conditions de vie les exposent davantage au virus, comme
l’impossibilité de recourir au télétravail ou l’habitat insalubre, et celles-ci aggravent le
risque de complication en cas de contamination.
Cette fragilité des plus précaires est d’abord un risque accru pour eux, mais également
pour l’ensemble de la société. Dans le cadre de cette pandémie, ils ont plus de risques
d’être à l’origine de nouveaux « clusters » susceptibles de relancer la propagation de la
maladie. Comme l’indiquait dès 2010 l’épidémiologiste britannique Richard Wilkinson,
plus les inégalités sociales sont grandes, plus les risques sanitaires sont élevés, pour
la société dans son ensemble . Or les inégalités ne cessent d’augmenter en France : ainsi
selon l’INSEE, l’indice de Gini, qui mesure les inégalités, aurait connu en 2018 sa plus
forte progression depuis 2010. Dans le même temps, le taux de pauvreté a augmenté lui
de 0,2 %, atteignant 14,3 %, de la population française, soit plus 9 millions de personnes.

