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PARTIE II
> Le mal-logement, un facteur de risque
Le manque d’accès aux soins dans les territoires français les plus démunis s’y double
également du problème de la suroccupation des logements, qui accroît l’exposition au
virus et réduit la possibilité de respecter les « gestes barrières ». Beaucoup d’associations
(CNL, DAL, ATD Quart-Monde…) ont tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences du
mal-logement dans la crise sanitaire, où des personnes doivent vivre 24h/24 dans des
habitations surpeuplées et/ou insalubres. Ainsi, 1,3 millions de Français vivent dans
des habitations insalubres . Le phénomène de surpeuplement des logements touche
9 millions de personnes en France, un chiffre qui augmente depuis 10 ans . Il y a
actuellement près de 7 millions de personnes en situation de précarité énergétique
selon l’Observatoire national de la précarité énergétique .
Aucune mesure gouvernementale n’a pourtant été obtenue pour remédier à ces situations,
alors que rien qu’en Seine-Saint-Denis, on estime que la suroccupation de logement
concerne un tiers de la population. Pour les sans-abris, des hôtels ont bien été réqui-
sitionnés mais tardivement et en nombre insuffisant, laissant des milliers de per-
sonnes à la rue, et d’autres entassées dans des gymnases. L’enjeu du logement est
d’autant plus important qu’il n’est pas seulement un frein à l’application des mesures
sanitaires nécessaires, mais aussi parfois le terreau de facteurs de risques médicaux
face au coronavirus. Alain Mercier, directeur du département de médecine générale
de l’université Paris-XIII, témoigne en ce sens dans Libération (7 mai 2020) à propos
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des risques liés à la suroccupation : « Plus il y a de personnes qui vivent dans un petit
appartement, plus l’humidité se développe, ainsi que la moisissure, les champignons…
Cela pollue l’air intérieur et aggrave les risques d’infection pulmonaire. »
La crise du Covid-19 accentue la précarité de vie de certaines catégories de population,
notamment les personnes migrantes et /ou sans papiers, dont la situation est très
préoccupante dans de nombreux territoires, notamment dans les outremers. À Mayotte,
le préfet Jean-François Colombet a transformé le centre de rétention administrative
en lieu de mise en quarantaine pour les migrants clandestins, pour éviter qu’un juge ne
demande leur relaxe en déclarant que : « la priorité, c’est la protection des Mahorais » .
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En Guyane, des personnes réfugiées en majorité syriennes (150 personnes à ce jour)
sont installées dans un campement dans le centre-ville de Cayenne dans des conditions
de vie insalubres et contraires à la dignité humaine. Un dispositif récent de mise à l’abri
d’urgence des plus vulnérables dans un gymnase laisse encore de trop nombreuses
personnes à la rue . En Martinique, des migrantes venant de Haïti, déjà très précarisées
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par l’interdiction de travailler, n’ont aucune possibilité de logement d’urgence.
> Des « emplois essentiels » dangereux
Fabien Villedieu, cheminot et délégué SUD-Rail, constate le poids de la division spatiale
du travail sur les lignes où il exerce en Île-de-France, avec de grandes différences de
fréquentation des gares selon qu’elles desservent des villes plus ou moins populaires.
Pour lui le constat est clair : les classes populaires sont souvent celles qui exercent des
métiers « sur le terrain », pour lesquels le télétravail est impossible et les transports en
commun indispensables . Cette partie de la population est donc plus souvent amenée
à devoir continuer à travailler malgré le confinement, et à prendre quotidiennement
les transports en commun pour s’y rendre, dans des conditions qui ne permettent pas
13 / « Un concentré de “fragilités’” », Libération, 7 mai 2020.
14 / « Secteur par secteur, le point du préfet de Mayotte sur la situation », Mayotte Hebdo, 16 avril 2020.
15 / « La Cimade alerte sur la situation alarmante des demandeurs d’asile syriens installés place
des Amandiers à Cayenne », France TV Info, 30 janvier 2020.

