Page 85 - 1. COMMISSION COVID-G2.indd
P. 85

/////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////




                                                                                                                     85


                                                                                                                        PARTIE II



                     >  Le mal-logement, un facteur de risque
                     Le manque d’accès aux soins dans les territoires français les plus démunis s’y double
                     également du problème de la suroccupation des logements, qui accroît l’exposition au
                     virus et réduit la possibilité de respecter les « gestes barrières ». Beaucoup d’associations
                     (CNL, DAL, ATD Quart-Monde…) ont tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences du
                     mal-logement dans la crise sanitaire, où des personnes doivent vivre 24h/24 dans des
                     habitations surpeuplées et/ou insalubres. Ainsi, 1,3 millions de Français vivent dans
                     des habitations insalubres . Le phénomène de surpeuplement des logements touche
                     9 millions de personnes en France, un chiffre qui augmente depuis 10 ans . Il y a
                     actuellement près de 7 millions de personnes en situation de précarité énergétique
                     selon l’Observatoire national de la précarité énergétique .

                     Aucune mesure gouvernementale n’a pourtant été obtenue pour remédier à ces situations,
                     alors que rien qu’en Seine-Saint-Denis, on estime que la suroccupation de logement
                     concerne un tiers de la population. Pour les sans-abris, des hôtels ont bien été réqui-
                     sitionnés mais tardivement et en nombre insuffisant, laissant des milliers de per-
                     sonnes à la rue, et d’autres entassées dans des gymnases. L’enjeu du logement est
                     d’autant plus important qu’il n’est pas seulement un frein à l’application des mesures
                     sanitaires nécessaires, mais aussi parfois le terreau de facteurs de risques médicaux
                     face au coronavirus. Alain Mercier, directeur du département de médecine générale
                     de l’université Paris-XIII, témoigne en ce sens dans Libération  (7 mai 2020) à propos
                                                                               13
                     des risques liés à la suroccupation : « Plus il y a de personnes qui vivent dans un petit
                     appartement, plus l’humidité se développe, ainsi que la moisissure, les champignons…
                     Cela pollue l’air intérieur et aggrave les risques d’infection pulmonaire. »

                     La crise du Covid-19 accentue la précarité de vie de certaines catégories de population,
                     notamment les personnes migrantes et /ou sans papiers, dont la situation est très
                     préoccupante dans de nombreux territoires, notamment dans les outremers. À Mayotte,
                     le préfet Jean-François Colombet a transformé le centre de rétention administrative
                     en lieu de mise en quarantaine pour les migrants clandestins, pour éviter qu’un juge ne
                     demande leur relaxe en déclarant que : « la priorité, c’est la protection des Mahorais » .
                                                                                                   14
                     En Guyane, des personnes réfugiées en majorité syriennes (150 personnes à ce jour)
                     sont installées dans un campement dans le centre-ville de Cayenne dans des conditions
                     de vie insalubres et contraires à la dignité humaine. Un dispositif récent de mise à l’abri
                     d’urgence des plus vulnérables dans un gymnase laisse encore de trop nombreuses
                     personnes à la rue . En Martinique, des migrantes venant de Haïti, déjà très précarisées
                                     15
                     par l’interdiction de travailler, n’ont aucune possibilité de logement d’urgence.

                     >   Des « emplois essentiels » dangereux
                     Fabien Villedieu, cheminot et délégué SUD-Rail, constate le poids de la division spatiale
                     du travail sur les lignes où il exerce en Île-de-France, avec de grandes différences de
                     fréquentation des gares selon qu’elles desservent des villes plus ou moins populaires.
                     Pour lui le constat est clair : les classes populaires sont souvent celles qui exercent des
                     métiers « sur le terrain », pour lesquels le télétravail est impossible et les transports en
                     commun indispensables . Cette partie  de la population est donc plus souvent amenée
                     à devoir continuer à travailler malgré le confinement, et à prendre quotidiennement
                     les transports en commun pour s’y rendre, dans des conditions qui ne permettent pas




                     13 / « Un concentré de “fragilités’” », Libération, 7 mai 2020.
                     14 / « Secteur par secteur, le point du préfet de Mayotte sur la situation », Mayotte Hebdo, 16 avril 2020.
                     15 /  « La Cimade alerte sur la situation alarmante des demandeurs d’asile syriens installés place
                        des Amandiers à Cayenne », France TV Info, 30 janvier 2020.
   80   81   82   83   84   85   86   87   88   89   90