Page 26 - La mafia des generaux-Hichem Aboud _Classical
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La mafia des généraux
son équipe. La maturité de ces jeunes policiers m'a donné
la preuve que, dans la police algérienne, il n'y avait pas
que des abrutis. Je suis placé en garde à vue, mais ils ne
me descendent pas dans les geôles du sous-sol. Santoudji
me cède le lit qui est dans son bureau, tandis que ses deux
collègues, Boubekeur et Abmed, donnent à même le sol.
Au moment des repas, nous aHons dans un restaurant en
ville, et ils me paient de leur poche le repas, le café, et
même les cigarettes. Mouloud, le chef de la police judi-
ciaire, qui m'a auditionné le lendemain soir avant que je
ne sois déféré devant le parquet, a agi de même. n a passé
la nuit assis sur sa chaise pour que je puisse dormir dans
son lit. Le matin, il m'a offert un copieux petit déjeuner
dans un café proche du commissariat central.
Pourtant, les instructions de leur hiérarchie étaient
très différentes. Santoudji a pu le vérifier, le soir même de
mon arrestation. À minuit, alors qu'il n'avait pas encore
fmi mon audition, il fut convoqué au siège de la DGSN,
où l'attendait Mohammed Ouaddah, le patron de la police,
entouré d'officiers supérieurs du DRS, de la gendarmerie
et de la présidence de la République. JI voulaient tous lire
la première partie du procès-verbal de mon interrogatoire,
et lui suggéraient les questions qu'il fallait me poser.
À son retour, il me demanda : « Dis-moi, qui es-tu
vraiment? Tout l'État est mobilisé pour ton arrestation. »
Il avait suffisamment l' habitude des cabales pour ne pas
être dupe. Je n'étais pas arrêté pour mes écrits ou un quel-
conque délit de presse. On voulait me présenter comme un
dangereux terroriste. Il me posa alors les questions qu'ils
lui avaient demandées : « Quelles sont tes relations avec
le Hezbollah libanais ? Quelles sont les mosquées que tu
fréquentes ? .. » Et dire qu'au début, on prétendait retenir
contre moi une simple coquille, qui avait changé le sens
d'une phrase dans l'article d'un de mes journalistes. Pour