Page 27 - La mafia des generaux-Hichem Aboud _Classical
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ne pas leur donner l'occasion de me piéger, j'avais passé
au pilon le numéro incriminé, après que Tayeb Belghiche.
rédacteur en chef du quotidien El Watan, eut attiré mon
attention sur le danger en lisant les premiers exemplaires
distribués aux confrères.
Le juge d ' instruction Hadji, du tribunal d'Alger, s'est
vite aperçu lui aussi qu'il s'agissait d'une cabale. L'accu-
sation, « atteinte aux intérêts supérieurs de l'État, trouble
de l'ordre public et de la sécurité publique », était loin
de le convaincre. Malgré l' insistance du procureur général
adjoint, Benhammou, un larbin aux ordres, le juge d'ins-
truction refuse de signer le mandat de dépôt, et se contente
de me placer sous contrôle judiciaire.
La mafia avait échoué dans son entreprise. Malgré la
violation de cinq lois de la République, elle n' a pas réussi
à me faire incarcérer. Tout le mérite cn revient aux poli-
ciers qui ont traité mon dossier et au juge d ' instruction.
La présidente du tribunal, dont j 'ai oublié le nom
- qu'elle veuille bien m'en excuser -, s' est distinguée à
son tour par une probité qui fait honneur au corps de la
magistrature algérienne. À l'audience du mois d'avril 1996,
elle prononce ma relaxe sans la moindre hésitation. Mon
avocat, Khaled Bergheul, un ancien camarade de classe du
lycée El Idrissi, refuse de toucher ses honoraires. C' est la
preuve qu ' en Algérie, avec des hommes et des femmes de
cette trempe, il y a encore de l'espoir.
Mon père, qui souffrait énonnément de ce que j'avais
subi en me battant contre une mafia qui ne lésine pas sur
les moyens pour briser ses adversaires, me supplie de quit-
ter le pays. Mais je ne suis pas homme à désanner facile-
ment. Puisque je ne peux plus écrire dans tes journaux
algériens, de crainte de leur attirer des ennuis, Le Quoti-
dien de Paris, que dirige Nicolas Miguet, m' engage
comme correspondant.