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                     Le Mauritanien Med Hondo a remporté le prix principal du festival
             « Journées de Carthage » avec Les Bicots Nègres Vos Voisins, dans lequel
             il approfondit ses réflexions sur l'immigration qu'il avait explorées dans le
             film précédent Soleil Ô (1970). Abhellatif Ben Ammar (Tunisie) a présenté
             Sejnane, un film sur les fondements de la lutte de libération nationale. Le
             Camerounais  Jean  Pierre  Dikongue-Pipa  et  le  Sénégalais  Safi  Faye,
             premiers producteurs africain, ont fait sensation par l'originalité de leurs
             films  Muna-Moto  et  Lettre  Paysanne.  Tous  ces  films,  d'un  style
             international,  té-  moignent  d'une  maturité  et  d'une  qualité  artistique
             étonnante, surtout au re- gard de leurs moyens financiers dérisoires et de
             leur manque de débouchés futurs. Le cinéma africain semble avoir atteint
             son « âge d'or »: il sera de courte durée.

             La réponse des compagnies étrangères

                     La conférence de Tunisie, en octobre 1974, avait vu la participation,
             entre autres, de deux invités en tant qu' « observateurs»: il s'agissait, en fait,
             du représentant du MPEAA qui régnait sur le Maghreb et l'Afrique anglo-
             phone, et du représentant de l'Union Générale Cinématographique, (PDG
             de L'UGC), groupe français dont la filiale, la Société de Participation Ci-
             nématographique Africaine (SPACIA) dominait le marché cinématogra-
             phique de toute l'Afrique occidentale francophone, après avoir racheté les
             circuits des anciennes sociétés coloniales SECMA et COMACICO. Dès
             lors, les sociétés étrangères changent radicalement d'approche du problème,
             l'exemple algérien ayant prouvé que le temps de la confrontation directe
             était révolu. Vient alors le temps des accords « à l'amiable » destinés à sau-
             vegarder la souveraineté nationale, devenue sensible, tout en préservant la
             présence d'un nombre équivalent de films occidentaux sur les écrans afri-
             cains. Résultat: un boom des films étrangers menacés un moment…et une
             nette régression du nombre de films africains produits.

                     Poursuivant sa politique d'africanisation apparente de son marché
             cinématographique, la SPACIA se transforme en Union Africaine de Ci-
             néma (UAC) et commence à vendre ses salles de cinéma à des particuliers
             africains, pour tenter de préserver l'essentiel: l'importation et la distribution
             du plus grand nombre possible de films étrangers, achetés à bas prix sur les
             marchés mondiaux (avec, en tête de liste, les films indiens et les films de
             karaté chinois), et faisant un profit excessif sur le sol africain.
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