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Férid Boughedir / Un cinéma en lutte pour sa liberté         185

          La naissance du CIDC

                 C'est alors qu'un nouveau partenaire africain fait son apparition :
         le Consortium Interafricain de Distribution Cinématographique (CIDC),
         l'un des regroupements régionaux que les producteurs de films avaient for-
         més par leurs votes, et dont les principes généraux avaient été votés par plu-
         sieurs Etats africains de l'Ouest francophone. Il est finalement mis sur pied
         en 1979, avec à sa tête un producteur de cinéma, le Nigérian Inousa Ous-
         seini. Un « marché commun » de la distribution cinématographique est né,
         s'étendant  sur quatorze  pays,  Sénégal, Mali, Mauritanie, Guinée, Côte
         d'Ivoire, Burkina Faso, Niger,  Togo, Bénin, Cameroun, Gabon, Congo,
         Tchad et Afrique centrale.
                 Devant la volonté des Etats, l'UAC a accepté fin 1980 de revendre
         son portefeuille de films au CIDC à des conditions telles que la France res-
         terait l'un des fournisseurs privilégiés de ce marché des pays francophones
         : néanmoins, pour la première fois, un marché commun de distribution de
         films en Afrique était réellement contrôlé par les africains, qui pouvaient
         enfin y introduire des films africains de façon normale. C'est à cela que s'at-
         tache le CIDC. Il a distribué depuis sa première année une cinquantaine de
         films africains. En essayant d'introduire sur son propre sol ce produit para-
         doxalement nouveau sur le marché, il se heurte régulièrement à la mauvaise
         volonté des propriétaires de salles de cinéma, qui préfèrent mettre ce qu'ils
         connaissent: Des westerns italiens, des mélodrames italiens, ou des films
         de karaté.

                 Cependant, le film africain a lentement commencé à prendre sa
         place, et le public aide à vaincre les oppositions au système. Il a triomphé
         avec les deux films qui ont remporté les principaux prix des septième et
         huitième FESPACO,  Djeli  (1981) de  Fadika Kramo-Lanciné  de Côte
         d'Ivoire et Finye / Le Vent de Soulemane Cissé du Mali. Les deux films,
         bien que considérés comme « culturels » et pas assez commerciaux pour
         les propriétaires des salles de cinéma, ont néanmoins battu tous les records
         du box-office dans leurs pays respectifs.


         1982 : Le manifeste de niamey
                 Réunis en conférence à Niamey, au Niger, en mars 1982, les pro-
         ducteurs de films africains ont rédigé un manifeste dans lequel ils réajustent
         leur position antérieure. L'expérience des dix dernières années a, en effet,
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