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352 FESPACO/BLACK CAMERA/INSTITUT IMAGINE 12:2
Certaines similitudes apparaissent néanmoins au sein des divisions
tripartites, indiquant une construction théorique essentiellement inchangée.
La catégorie du réalisme social de Diawara, comme la phase d'as-
similation sans réserve de Gabriel, est caractérisée par des films qui utili-
sent la musique, la romance et la comédie pour divertir le public. Diawara
décrit cette catégorie comme une forme populaire en raison de sa capacité
à s'identifier au public de la classe ouvrière, alors que Gabriel dénigre cette
forme comme un cinéma régressif, capitaliste et identifié à l'Occident. Il
s'agit là d'un geste significatif de la part de Diawara, qui resitue en fait la
culture populaire comme valide dans le contexte africain, alors que Gabriel
la rejette d'emblée.
La catégorie « retour aux sources » de Diawara, caractérisée par
l'absence de polémique, comprend des films qui examinent les conditions
précoloniales africaines par rapport aux problèmes postcoloniaux et des
films qui s'efforcent de développer un langage cinématographique africain
distinctif. Elle est presque identique à la « phase du souvenir » de Gabriel,
décrite comme un effort d'indigénisation de l'industrie et du style cinéma-
tographique, favorisant le conflit narratif entre le passé et le présent. Ga-
briel fait un éloge conditionnel de cette deuxième catégorie, tandis que
Diawara ne privilégie ni ne rejette cette catégorie de films.
Enfin, la catégorie « Confrontation coloniale » du cinéma africain
correspond étroitement à la « phase combative » de Gabriel, qui renvoient
toutes deux à une catégorie de films jouant sur l'opposition initiale entre le
tiers-monde/l'Afrique et l'occident/hollywood, bien que la catégorie de Dia-
wara soit un peu plus étroite que celle de Gabriel; ce dernier inclut dans
cette phase non seulement l'effort de lutte contre le néocolonialisme, mais
la tentative de rendre explicites les représentations idéologiques anticapi-
talistes.
Plus importantes que les similitudes entre les catégories telles
qu'elles ont été construites par Gabriel et Diawara sont les marges entre
les divisions tripartites. La contradiction entre l'interprétation néo-marxiste
et moderniste du cinéma réaliste/populaire/assimilationniste, caractérisée
par le problème de comprendre adéquatement La Vie est Belle ( de Mwezé
Ngangura et Benoît Lamy, 1987, République démocratique du Congo) ou
Une saison blanche et sèche, par exemple, comme adhérant strictement aux
catégories réaliste ou assimilationniste, occidentale ou africaine, signale
une caractéristique problématique essentielle de la construction de catégo-
ries pour décrire le cinéma du tiers-monde et africain . Ce qui est en jeu,
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c'est plus que la différence entre les positions de deux critiques par rapport
aux objectifs politiques et idéologiques du cinéma ou de la critique, ou le