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lesquels les cultures médiatisent l'ordre social. Dans Zan Boko, l'insistance
sur un rituel de l'eau (pour pallier les douleurs de l'accouchement) est si-
gnificative non seulement parce que la naissance et l'enfant sont symbo-
liques de la capacité de régénération de la culture ; fondamentalement, elle
positionne le film dans un système de croyances sur lequel d'autres réalités
interagissent avec les réalités quotidiennes.
Passerelles
Il est important de noter que les expressions cinématographiques
africaines contemporaines ne sont pas très concernées par le contrôle des
identités et des formulations culturelles. Plutôt que de construire une per-
sona monolithique anathématique à la « modernité », ces œuvres proposent
une analyse critique de soi et du monde. Mama Dingari, la propriétaire
citadine de La Vie est Belle, qui est encline à l'exploitation, accuse à un
moment donné M. Nvouandu, le riche prétendant de Kabibi, d'être
un « féticheur » c'est-à-dire un aficionado des pouvoirs « obscurs », lui
interdit de mettre les pieds dans sa propriété et suggère même que Kabibi
aille au village pour un « exorcisme ».
Il est intéressant de noter que sa répugnance n'est pas tant fondée
sur des principes altruistes; elle découle plutôt de la conviction que sa pré-
tendue propension à la violence pourrait lui causer un malaise. Dans Quar-
tier Mozart, Lady Di est admirée comme une initiatrice de tendances;
Michael Jackson est rejeté comme étant « trop efféminé », au profit de
Denzel Washington, qui est considéré comme un « vrai homme fin comme
le vin ». On nous parle aussi du cycle menstruel de Caroline de Monaco
et de la façon dont (certains) Afro-américains, teintés de propagande raciste
et embrigadés dans un milieu identificatoire tout aussi complexe, reflètent
une vision négative des africains : « Ils pensent que nous sommes des
sauvages ». Dans La Vie est Belle, on entend aussi la question: « Vous jouez
à Rambo, hein » ? Une référence évidente au personnage hyper-masculiniste
de Sylvester Stallone à l'écran. Dans Zan Boko, une émission de télévision,
« Le rêve d'or », promet d'emmener les téléspectateurs sur « la magnifique
riviera ». Ces exemples semblent indiquer que la plupart des films africains
cherchent plutôt à ouvrir des espaces de compréhension, de négociation et
d'interprétation de leur situation difficile contemporaine.