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très peu de travaux critiques sur les films réalisés par des africains prennent
en compte ce type de dimensions spirituelles et extraterrestres. L'une des rares
exceptions est le travail de l'anthropologue français Jean Rouch, qui a utilisé
sa caméra pour essayer de comprendre « l'impensable scientifique » qui se
produisait parmi ses collaborateurs au Niger .
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Peut-être est-ce le contexte plus qu'essentiellement physique, ou
matériel, des ontologies et expériences africaines représentées dans ses ci-
némas qui est inexplicable en termes de théories cinématographiques occi-
dentales conventionnelles. C'est l'une des raisons pour lesquelles l'analyse
académique se concentre sur le matériel, les intrigues et les structures in-
dustrielles, en évitant l'esthétique, la forme et la signification de l'interrela-
tion ce que Gerima appelle « le système nerveux central de ce qui est en
jeu, le langage cinématographique africain ». Il poursuit: « Tant que la théo-
rie critique du cinéma africain ne fait pas la transition vers l'analyse critique
(l'analyse critique traite à la fois du contenu et de la forme), l'état du cinéma
africain, qui a maintenant trente ans, reste sous-développé ». Le rôle d'une
théorie critique du cinéma africain, conclut-il, n'émergera que lorsqu'une
théorie appropriée « s'imposera comme médiateur entre le cinéaste africain
et le public africain ».
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Troisième cinéma africain les réalisateurs font partie de leurs so-
ciétés en relation avec les activités quotidiennes de ces sociétés ; leur pro-
fession les place dans une position unique en ce qui concerne l'exploration
de ces activités de manière à briser la façon dont le cycle de dépendance a
influencé l'activité sociale quotidienne de leurs spectateurs. Le montage et
l'encodage dans les films africains critiques reflètent cette gnose selon la-
quelle le monde est interconnecté à travers les spécificités des langues afri-
caines. L'écrivain en Afrique, par exemple, travaille à sa machine à écrire
au milieu d'une rue, et non pas en retrait, dans l'isolement de l'artiste ou du
littérateur occidental. Elle fait partie de la vie quotidienne sur laquelle elle
écrit et qui l'entoure. Cette image soulève des questions sur la nature de
l'africanité et l'accent qu'elle met sur l'être, sur la totalité, sur un monde in-
tégré non séparé en dualismes, alors que l'artiste occidental a tendance à se
cacher de la « vie » dans l'isolement tout en « créant ».
Les rêves comme partie de la vie
Dans les ontologies africaines, le rêve se situe dans le domaine de
l'existence en tant que partie du « courant de liaison » dans lequel le contact