Page 174 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France                                                                              Morphiniques et médicaments de substitution



                 difficiles, qui devraient bénéficier d’une écoute toute particulière,
                 être conseillés, soutenus, encouragés, mais aussi examinés. Les
                 problèmes somatiques induits par les toxicomanies sont souvent
                 plus importants  que ceux rencontrés  dans la  moyenne  de la
                 patientèle. Pour satisfaire l’ensemble de ces exigences, le temps
                 de la  consultation  ne peut se dérouler  en dix  minutes  ;  temps
                 d’enregistrement de la carte vitale et de rédaction de l’ordonnance
                 compris…
                   Il avait été prévu, lors de l’autorisation de mise sur le marché de
                 ce Subutex , que les médecins prescripteurs devraient suivre une
                           ®
                 formation particulière dédiée à ce médicament, nettement au-delà
                 de la présentation, essentiellement commerciale, qui leur en est faite
                 par la déléguée médicale du laboratoire. D’une rapide analyse, il
                 ressort qu’il s’agissait là d’un vœu pieux, sans suite réelle.
                   On doit déplorer aussi que cette buprénorphine ne soit jamais
                 prescrite  à doses dégressives, s’inscrivant dans une démarche
                 visant, éventuellement  lentement  mais sûrement, l’abstinence ;
                 comme si l’on ne voulait pas prendre le risque de réduire le nombre
                 des héroïnomanes.  Cette  pratique  des doses constantes,  voire
                 même croissantes (surtout quand le trafic s’en mêle), maintient
                 le patient, ad vitam dans son état de dépendance, c’est-à-dire de
                 grande précarité psychologique. Cette situation comporte le risque
                 qu’à l’occasion d’un drame de la vie, d’un nouveau « bleu à l’âme »,
                 d’une nouvelle rupture, le patient reparte aussitôt vers son héroïne
                 qu’on ne lui aura pas permis d’oublier.
                   On ne  dispose  pas  de  statistiques  sur le  succès  du  sevrage
                 réalisé chez les patients ayant été mis « sous Subutex  ». Cela
                                                                      ®
                 conforte dans l’idée que lorsque les chiffres portant sur certains
                 thèmes sensibles s’annoncent pitoyables, soit on ne cherche pas à
                 les établir, soit ils ne sont pas communiqués. Pitoyable, lamentable
                 est l’impression qui prévaut quand on regarde et interroge  à
                 l’entour. Quand on s’en émeut, il nous est invariablement répondu
                 que l’objectif du sevrage n’est pas décrit dans les indications du
                 Subutex  («  Traitement  substitutif  des pharmacodépendances
                        ®
                 majeures aux opiacés, dans le cadre d’une thérapeutique globale
                 de prise en charge médicale, sociale et psychologique ») ; qui vise
                 le moins et s’en contente, évite le plus.


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