Page 33 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France               Drogues, toxicomanies, addictions



                   des usages ultérieurs, l’amertume perd son caractère désagréable,
                   et  même,  sur un mode  pavlovien,  se trouve  associée  au  plaisir
                   produit par l’alcool,  étant  ressentie  d’une façon agréable,  au
                   point d’être ultérieurement recherchée.  En forçant le trait, on
                   irait jusqu’à imaginer que si nos fèces contenaient de la cocaïne,
                   certains deviendraient coprophages (i.e. les consommeraient) ; ou
                   si la drogue apparaissait en forte concentration dans les urines,
                   la tentation serait alors de les boire. Les médias nous ont appris
                   que le président Bolivien,  Evo Morales, qui avait manifesté
                   à l’ONU contre le classement de la coca comme stupéfiant (en
                   mâchant ostensiblement une feuille de cette plante), s’est aussi
                   fait le prosélyte des vertus de l’urine, en déclarant,  lors de
                   l’inauguration d’un hôpital à Cochabamba, que durant son enfance
                   dans la cordillère des Andes, il avait l’habitude d’en boire. Sans
                   référence à son nom (Morales), ni à sa morale, sachez que cette
                   « urinothérapie » a pour nom amoralie… L’appétence l’emportant
                   sur l’aversion, la recherche du plaisir peut conduire « à brûler ce
                   qu’on a adoré et à adorer ce qu’on a brûlé »…
                      Les effets développés par des doses croissantes d’une drogue
                   s’inscrivent sous la forme d’une courbe en U renversé, (ou, mieux,
                   d’un  n minuscule  en  italique).  Le  plaisir  ressenti  croît  avec  la
                   dose, jusqu’à une inflexion, qui correspond à celle sur laquelle
                   l’utilisateur  fixe  sa  consommation.  Au-delà  de  cette  dose,  des
                   effets désagréables, voire toxiques, suscitent des troubles, au point
                   de contredire le plaisir qui était ressenti et partant recherché.
                      Au fil des usages s’installe, plus ou moins rapidement selon
                   les drogues, l’abus. La courbe qui exprime  l’effet en fonction
                   de la dose (« courbe effet-dose ») se modifie ; elle conserve son
                   allure bi-phasique, mais son sommet s’élève, car le plaisir croît
                   avec la répétition des doses, tandis que le déplaisir diminue. Enfin,
                   l’ensemble de la courbe est souvent déporté sur la droite, en raison
                   de l’installation d’une tolérance, qui fait requérir des doses plus
                   élevées pour recouvrer l’effet initialement perçu.
                      La tolérance  n’est pas l’apanage des drogues ; c’est un
                   phénomène  fréquemment  constaté  en  pharmacologie.  Elle
                   correspond à la nécessité, au cours de l’utilisation chronique d’un
                   agent  pharmacologique,  d’accroître  ses doses pour maintenir


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