Page 96 - Desastre Toxicomanie
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Le désastre des toxicomanies en France                                                                               Le chanvre indien, devenu tellement français



                 solubles dans l’eau). Ces métabolites peuvent alors franchir le filtre
                 rénal pour être éliminés par l’urine (« canabinoïdes urinaires »).
                 Ainsi se vérifie et s’explique l’expression : « un joint c’est pour
                 une semaine dans la tête et plein de joints c’est pour des semaines,
                 et même des mois, dans le cerveau et dans les panicules adipeux
                 de l’organisme ». De toutes les substances connues (à l’exception
                 peut-être d’un médicament pour le cœur - l’amiodarone) le THC est
                 la seule substance qui s’attarde aussi longtemps dans l’organisme
                 (en l’occurrence le cerveau) après son introduction dans celui-ci.
                   Quand un consommateur de cannabis interrompt  sa
                 consommation, ce n’est qu’après deux à trois jours qu’il perçoit
                 nettement les premiers effets de sa privation, et qu’il ressent le
                 besoin impérieux d’en consommer à nouveau. Ce long intervalle
                 libre,  comparé aux  60 à 90 minutes  intercalées  entre  deux
                 cigarettes de tabac, a été interprété, à tort, comme la preuve d’une
                 faible dépendance au cannabis. Cette interprétation est erronée.
                 Ce  long intervalle  libre  est  la  conséquence  de  l’exceptionnelle
                 persistance du THC dans l’organisme, comparée à la brièveté de
                 celle de la nicotine. Le THC n’est pas une drogue douce, c’est une
                 drogue lente, très lente même. L’assertion de la modestie de son
                 pouvoir d’accrochage  voulait  méconnaître  cette  caractéristique
                 très singulière.  Une telle interprétation  arrangeait  ceux  qui
                 voulaient banaliser cette drogue. On est frappé, mais pas dupe, de
                 la facilité avec laquelle elle a fait son chemin. Les interprétations
                 erronées qui plaisent abolissent l’esprit critique ; on s’en contente
                 rapidement en évitant de chercher une autre explication et on les
                 diffuse très rapidement dans l’opinion.
                   Une autre facétie du THC est liée à sa disparition rapide du sang.
                 Elle ne correspond pas, hélas, à son élimination de l’organisme,
                 pour le faire apparaître dans les égouts de la ville, via l’urine ou les
                 fèces. Elle est au contraire suivie de son stockage durable dans le
                 cerveau et dans les panicules adipeux du corps (à un bien moindre
                 degré, car ils sont beaucoup moins irrigués par le sang que l’est
                 le cerveau). C’est là une différence essentielle avec l’alcool ou
                 la nicotine qui, quand elles disparaissent du sang, disparaissent
                 simultanément du cerveau et de tout l’organisme.


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