Page 836 - Traité de chimie thérapeutique 6 Médicaments antitumoraux
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794                                    RÉSISTANCE AUX ANTTTUMORAUX


               Le phénotype MDR associé à LRP/MVP inclut la résistance à des cytotoxiques éga-
             lement substrats de la Pgp et de la MRP (anthracyclines, alcaloïdes des Vinca, épipodo-
             phyllotoxines, taxoides), mais aussi la résistance aux complexes du platine (cisplatine et
             carboplatine) et aux moutardes à l'azote (melphalan). Sur des cellules provenant de car-
             cinome humain de côlon, LRP/MVP joue un rôle dans le transport de la daunorubicine
             entre le cytoplasme et le noyau.
               En d'autres termes, au lieu de se diriger vers son site d'action, généralement le noyau,
             le cytotoxique une fois qu'il a pénétré dans la cellule, est «séquestré » par les vaults
             présents dans le cytoplasme. L'expression de LRP/MVP est généralement prédictive
             d'une mauvaise réponse à la chimiothérapie. Dans certains types de leucémies (LAM) et
             les cancers ovariens, son expression constitue un facteur pronostique défavorable.

              2.  RÉSISTANCE DUE À UNE ADAPTATION
                   DES PROCESSUS DE DÉTOXICATION
              Face au cytotoxique, la cellule tumorale adapte ses capacités de détoxication et de
              séquestration de façon à le rendre inactif. Un des mécanismes le mieux connu est le
              système glutathion/glutathion-S-transférase (GSH/GST), pour lequel sont observées une
              augmentation importante de la concentration en GSH intracellulaire et une surexpression
              des GST dans de nombreuses lignées cellulaires tumorales.
                Le glutathion (GSH) est le thiol intracellulaire non protéique le plus abondant. Sa struc-
              ture est celle d'un tripeptide, N-(y-L-glutamyl-L-cystéinyl)glycine, ionisé à pH 7.
                               ,s"
                     g
                  Al
                       NH,       O
                                                    pH physiologique
                Le GSH est impliqué dans de multiples processus biochimiques dont la plupart est
              liée à la réactivité de la fonction thiol : réactions nucléophiles, réactions de complexation
              ou encore réactions d'oxydoréduction selon un processus monoélectronique. Les deux
              premiers mécanismes intéressent plus particulièrement la chimiorésistance.
                La conjugaison de composés xénobiotiques au GSH par addition nucléophile du thiol
              donne des composés plus hydrosolubles. Les conjugués GS-R sont métabolisés en
              dérivés N-acétylcystéine ou acides mercapturiques, excrétés par voie urinaire
              (cf. schéma 1). La conjugaison se fait par voie chimique ou enzymatique via les gluta-
              thion-S-transférases (GST). Les GST constituent une classe d'isoenzymes dimériques
              multifonctionnelles essentiellement localisées dans le cytosol et réparties en cinq familles
              (a, µ, 1t, o, 0) selon la structure primaire. Elles comportent deux sous-unités pouvant
              former des complexes enzymatiques homo ou hétérodimères.
                Une des conséquences du processus de détoxication est la résistance aux cytotoxi-
              ques, et en particulier aux alkylants. Les moutardes à l'azote (chlorambucil, melpha-
              lan ...), les oxazaphosphorines, les nitrosourées ou encore les complexes de platine se
              lient à GSH par voie chimique ou enzymatique (GST) (cf. schéma 2). Mais d'autres cyto-
              toxiques sont concernés : anthracyclines (doxorubicine), bléomycine, thiotépa. Les con-
              jugués biologiquement inactifs sont éliminés par les MRP.
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