Page 851 - Traité de Chimie Thérapeutique 4 Médicaments en relation avec des systèmes hormonaux
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           turbe alors les phénomènes de prolifération et de différenciation en agissant comme
           inhibiteur dominant sur les produits du gène RARa normal, du gène PML normal ou
           sur les deux. Les voies inductibles de la maturation sont alors bloquées, conduisant à
           une leucémie.
            • Trétinoïne
           Seul l'acide fouf-frans-rétinoïque est capable de redifférencier les cellules de LAM
           M3 ; l'isotrétinoïne est moins active, l'étrétinate inactif.
             Sous trétinoïne, les cellules malignes se différencient progressivement en cellules
           granulocytaires normales. Puis les cellules anormales disparaissent, tandis que se for­
           ment des cellules normales de la moelle. Des rémissions complètes sont alors obte­
           nues (95 % en première intention).
             Par ailleurs, le syndrome hémorragique, dû à une fibrinolyse et à une protéolyse, et
           bien souvent à l'origine de l'issue fatale, s'estompe très rapidement avec normalisa­
            tion des paramètres de la fibrinolyse. En quelques heures, le fibrinogène retrouve un
            taux normal.
             Cet effet, a priori paradoxal de la trétinoïne, est très mal compris. Comment le
            ligand d'un récepteur peut-il produire un effet alors que le récepteur est altéré ? En
            faisant l'hypothèse que le défaut primaire est lié à une interférence de type dominant
            négatif du récepteur chimère avec les RAR, il est plausible qu'à très fortes doses de
            trétinoïne, le récepteur chimère puisse être déplacé par d'autres récepteurs. Les RXR,
            activés aux fortes doses de trétinoïne, pourraient être ainsi sollicités et jouer un rôle
            supplétif. Les études se poursuivent activement dans ce domaine.
              Au niveau cellulaire, à court terme, la trétinoïne n'entraîne pas la disparition de la
            protéine chimère PML-RAR, sans savoir en fait où elle se localise dans la cellule après
            traitement. De Thé, Degos ef al. ont montré que le traitement par la trétinoïne s'accom­
            pagne de la réorganisation d'organites nucléaires appelés "corps nucléaires" qui se
            trouvent "éclatés" au cours de la maladie (cf. "Un nouveau comportement nucléaire
            révélé par des auto-anticorps de la cirrhose biliaire primitive, pourrait être impliqué
            dans la pathogénie de la leucémie aiguë promyélocytaire", De Thé, C. Chomienne,
            L. Degos ef a/., Médecine/Sciences, 1994,10, 577-582).
             • Rechutes
            Si le traitement permet d'obtenir un taux élevé de rémissions, les rechutes sont
            cependant fréquentes après 5 à 10 mois, par acquisition d'une résistance très proba­
            blement due à l'induction de mécanismes de catabolisation. L'activité de la 4-
            hydroxylase du cytochrome P450 est très augmentée, tandis que l'accroissement du
            taux de CRABP assure le piégeage de la trétinoïne dans le cytoplasme avant
            d'atteindre le noyau.
              C’est pourquoi, est associé à la trétinoïne un traitement chimiothérapique complé­
            mentaire classique. L'association augmente d'emblée le taux de rémissions com­
            plètes et réduit de moitié le taux de rechutes. D'autres coadministrations ont été pro­
            posées : le kétoconazole pour bloquer le cytochrome P450, l'interféron (IFN) en tant
            que modificateur de la réponse biologique et le filgrastim (Colony Stimulating Factor
            Granulocyte : CSF-G).
              La dose journalière usuelle de trétinoïne est de 45 mg/m2 de surface corporelle.
            • Incidents ("syndrome des rétinoïdes")
              En dehors des effets indésirables qui seront développés plus loin, apparaissent
            précocement (au cours de la première ou deuxième semaine) une hyperleucocytose
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