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LIBÉREZ VOTRE CERVEAU !
comme un élément de la solution au problème. Il n’y a donc pas vraiment
de résultat attendu, si ce n’est que la plupart des gens vont faillir à considé‑
rer le contenant des punaises comme une véritable solution au problème.
En 1962, le psychologue Sam Glucksberg voulut observer, entre autres,
si une récompense monétaire pouvait améliorer les performances des
personnes testées. Il distingua deux groupes d’étude : l’un à « haute
motivation » et l’autre à « basse motivation ». Aux membres du premier
groupe, la solution du problème donnait une chance de gagner entre 5
et 20 dollars (5 pour le quartile le plus rapide du groupe et 20 pour le
premier de la classe). Aux membres du second, on ne promettait rien.
De façon tout à fait inattendue, c’est le groupe pour qui la solution du
problème était « gratuite » qui réussit le mieux. Glucksberg donna de
ce test l’interprétation suivante : alors que la promesse de récompense
encourage notre cerveau à se placer dans une situation connue (dans
l’esprit de l’exercice corrigé, en somme), son absence augmente ses degrés
de liberté. Je partage tout à fait son point de vue : l’esprit « premier de la
classe » détruit la créativité et encourage la conformité. La note, la récom‑
pense améliorent la conformité, avec toutes les conséquences dramatiques
que cela implique … Preuve, encore une fois, qu’il faut remettre la vie
notée à sa juste place, et la jeter à bas du trône qu’elle a usurpé.
5. Le cerveau ne réagit pas de la même façon
aux gains et aux pertes
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On place un chamallow devant un singe capucin . On tire une pièce à
pile ou face : face on lui offre un deuxième chamallow, pile, il ne se passe
rien. Dans cette configuration, le singe est content de voir la deuxième
guimauve arriver devant lui. Modifions légèrement l’expérience : les deux
chamallows sont présents d’emblée sur la table, et une fois sur deux, on
en retire un. En termes de probabilités les situations sont identiques : le
singe a une chance sur deux de gagner un ou deux chamallows. Pourtant,
la première situation, qui lui présente le tirage comme une opportunité
de gain, est agréable à son cerveau, alors que la deuxième, qui le lui
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présente comme un risque de perte, est désagréable .
1. Ils adorent les chamallows, s’en gavent et vont jusqu’à se faire vomir pour pouvoir
en absorber d’autres. Heureusement que, dans la nature, les chamallows ne poussent
pas sur les arbres…
2. Dans cette version, l’expérience est due à l’économiste de l’Université de Californie
à Los Angeles M. Keith Chen et à ses collaborateurs Chen, M. K., Lakshminarayanan,
V. et Santos, L. R., « How basic are behavioral biases? Evidence from capuchin monkey
trading behavior », Journal of Political Economy (2006), 114, 517‑537.
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