Page 119 - Des ailes pour le Brésil
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Elle ne parvint pas à soigner toutes les séquelles de mon vécu,
qui je l’espère se sont estompées avec le temps, et ma nouvelle vie
au Brésil.
Nos échanges m’amenèrent à la recherche d’une nouvelle forme de
vie.
Le mieux, c’était de couper avec ce que j’avais connu et vécu,
c’est à dire changer de mode de vie.
Socrate disait, n’ayant jamais écrit « Pour vous retrouvez,
assumez le risque de penser par vous-même ».
Pendant ma dépression, les moindres évènements prenaient des
proportions étranges, je me sentais vide, morose, irascible,
renfermé, sans cesse fatigué.
Les sentiments, les énergies qui m’animaient autrefois, s’étaient
dissous, décomposés, envolés à tire-d’aile. Un jour que je me
promenais sous un beau soleil à Auteuil, je m'arrêtai devant le
parterre de l’église située près de la grande maison de retraite de
Sainte Perrine.
En face de cette bâtisse blanche, se trouvait un seul banc vide et
je m'y assis. Surgis alors un vieil homme de bon aloi qui m’expliqua
avec véhémence que c'était son banc de prédilection et qu’il se l’était
attitré en hiver, quand quelques rayons de soleil avaient la bonté de
bien vouloir apparaître.
Je pense en fait qu’il était à ce stade de solitude où l'on a besoin
de parler et de tenter de marquer son territoire.
Ce petit banc était probablement devenu sa station terminus,
quel triste et sinistre dénouement pour ce solitaire.
Un livre des années 20 que m’avait prêté Bernard « Passy-Auteuil
où le vieux monsieur du square » avait fini par me convaincre - Francis
de Monandre, Delpech édition, 1929. 10
Je compris ce jour-là que je devais envisager ma retraite et mon
avenir autrement et ailleurs mais cela ne s’improvise pas !
Cette rencontre fut certainement le détonateur du choix de ma
nouvelle vie. Peu de choses me retenait à Paris, où claquemuré dans
mon appartement, je supportais de moins en moins l’inactivité.
Les conditions du temps « suspendu et retrouvé » étaient devant
moi, avec l’éclat de l’inconnu.