Page 81 - Des ailes pour le Brésil
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Je n’ai vu du défilé que les dernières minutes. À peine assis à ma
table avec mon ami, j'entendis un bruit sourd de chute derrière moi.
Me retournant, je vis une Miss, étalée par terre,
sans doute victime de ses hauts talons. En parfait
gentleman, je volais à son secours et ensuite nous
avons commencé à bavarder en anglais. Le
syndrome du chevalier blanc dans toute sa
splendeur, le Saint-Bernard, le sauveur,
n’espérait-t-il pas recueillir l’admiration ou
l’amour de cette créature de rêve ?
Je la soutins jusqu’à son hôtel tout proche,
courtoisement en parfait homme galant.
Un médecin de nuit fut appelé.
Sharon, c’était le prénom de la belle qui se plaignait d’une
entorse à la cheville.
J’appris plus tard, par hasard que c’était la Miss Univers de
l'année et qu’elle avait servi dans l’armée israélienne.
Fier comme un coq, je m’exhibais avec elle dans les plus chics
restaurants à la mode.
J’évitais toutefois les boîtes de nuit où il était fréquent que des
personnages mal élevés s’invitent à notre table, sans aucun scrupule,
en prétextant subitement une longue amitié.
Elle était trop imbue d’elle-même, et sans futur pour moi, elle
voulait devenir actrice de cinéma.
Elle partit quelques mois après notre rencontre, pour les États-
Unis. Nous nous sommes revus une seule fois, longtemps après à
Paris.
Je la retrouvais très amaigrie avec mauvaise mine.
Aux creux de ses coudes, je découvrais avec stupeur d’inquiétantes
traces de piqûres, couleurs rouges et violacées.
Mon dégoût pour la drogue n’a jamais été aussi fort.
CHAPITRE V.
Les ailes orientales, Bali, Hong Kong, Singapour, Beijing,