Page 45 - LOGEMENT SOCIAL ET SANTE MENTALE : LIMITES JURIDIQUES ET PERSPECTIVES
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Chapitre 2 : Les alternatives développées suite aux contraintes du secteur de
la santé mentale
La gestion des locataires atteints de troubles mentaux est contrariée suite aux évolutions du
secteur de la santé mentale (section 1). Toutefois, les bailleurs sociaux, de la métropole,
innovent, expérimentent et s’impliquent dans de nouvelles instances pour favoriser
l’articulation entre le logement, le secteur social et la santé mentale (section 2).
Section 1 : Des contraintes fortes pour les bailleurs sociaux suite à la
« désinstitutionnalisation » de la santé mentale
Le refus des soins psychiatriques par la population martiniquaise (1) et le renforcement de la
« déshospitalisation » de la psychiatrie (2) impactent la gestion des locataires atteints d’un
trouble mental.
Paragraphe 1 : Le refus des soins psychiatriques par la population martiniquaise
Selon le docteur Ariane BAUDU de l’hôpital psychiatrique « l’accès aux soins psychiatriques
est toujours un sujet « tabou » en Martinique. Il est encore associé au magico-religieux ». De
plus, selon le psychiatre FOUCHER, le comportement de la population antillaise est différent
de celui de la métropole. En effet, en Martinique, « le mal-être est lié à la faute de l’autre.
L’individu est dans une position défensive, dans un délire de persécution et la personne se place
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en qualité de victime. Elle ne se sent pas responsable du fait ou de l’acte ». En métropole « les
habitants ont plutôt tendance à se dévaloriser, à se sentir incapable, à avoir de la perte d’estime
de soi, ce qui explique que les tentatives de suicide sont plus nombreuses en métropole qu’en
Martinique ». Compte tenu de la culture locale, il est probable que les locataires ayant des
troubles de santé mentale iront moins facilement vers les dispositifs de soins que les locataires
de la métropole. En effet, « l’hospitalisation libre concerne 77,4 % des patients en métropole
alors qu’elle représente 32,9% en Martinique. En revanche, les hospitalisations sous
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contraintes sont plus nombreuses ». Elles représentent « 67,1 % des hospitalisations
psychiatriques, en Martinique contre 22,6 % en métropole en 2015 ». De plus, en 2016,
seulement 12% des locataires atteints d’un trouble mental ont accepté de rentrer dans un
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dispositif de soins hospitalier ou en ambulatoire . Mais l’offre psychiatrique est limitée en
Martinique (cf. annexe 14 p.74).
86 Référence au livre de Raymond MASSE, Détresse créole : Ethnoépidémiologie de la détresse psychique en
Martinique, Québec, Presses de l’Université de Laval, 278 pages
87 Rapport d’activité du centre hospitalier psychiatrique du 24 mai 2016, p.16, 94 pages
88 ALS, Rapport d’activité, p.14, 30 pages
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