Page 85 - le barrage de la gileppe
P. 85

85
                   En réalité, ce discours était un modeste compliment, d’ailleurs très bien tourné,
                qu’il lut avec crânerie.


                  L’élève Pirenne ayant terminé, le souverain le remercia et l’appelant auprès de lui :
                   .
                      — Voulez-vous me remettre votre discours, mon ami ? demanda-t-il.

                             Le petit Henri balbutia :
                      — Sire, je ne peux pas...
                      — Pourquoi ? insista le roi.
                      — Parce que... heu... Et Henri Pirenne rougissait comme une petite fille.
                        — Voyons ! Donnez-le-moi !
                      — Non, répétait le malheureux rhétoricien à la torture, la sueur lui coulant
                 du front.
                      — Je l’exige ! coupa Léopold II.
                      — Heu... Sire, il est vraiment trop sale !

                      Pendant la longue attente, le brave petit élève avait tenu le papier sur sa poitrine,

                et il faisait très chaud...

                          Vers  11  h  30,  le  cortège  royal  quittait  la  Gileppe,  sous  les  acclamations.

                Revenant de Dolhain, le train spécial s’arrêta à 12 h 45 en gare de Verviers.



            A Verviers


              Depuis 10 heures du matin, la population de la ville paraissait doublée. Toutes les

            boutonnières étaient ornées de rubans tricolores. Les dames portaient sur la poitrine des

            nœuds aux couleurs belges.


                Les sociétés de tir étaient arrivées nombreuses, surtout des villages de l’Est où elles

            sont restées en grande vogue, et formaient des groupes bigarrés, avec leurs rois portant

            un bouquet de fleurettes ou une couronne blanche à leur haut-de-forme.


               Le long du cortège qui traversa la ville, la haie était formée par la gendarmerie, la

            cavalerie de la garde-civique et les tireurs étrangers.


               La voiture du roi Léopold quitta le cortège, place Sommeleville, pour disparaître sous le

            porche de l’hôtel du vicomte Emmanuel de Biolley, où une réception intime était offerte à

            Sa Majesté

               A 2 h 30 — chose rare : à l’heure prévue ! —, le roi et la famille royale, le comte et la

            comtesse de Flandre, suivis d'un groupe imposant de hauts personnages de la cour, du

            gouvernement, de l’armée, de la magistrature et du clergé, étaient reçus à l’hôtel de

            ville.


               Le roi fut conduit au Salon royal, où un trône en velours rouge à crépines d’or,

            surmonté de la couronne et encadré de panaches et de drapelets, était installé contre la

            fenêtre centrale.

              Et les discours commencèrent.
   80   81   82   83   84   85   86   87   88   89   90