Page 88 - le barrage de la gileppe
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Un procès 88
Nous avons dit quelle place de choix Victor Doret occupe parmi les promoteurs du
barrage.
Doret était un usinier, ne l’oublions pas, et il partageait avec bon nombre de ses confrères
.
l’opinion que le réservoir ne devait servir qu’à régulariser le cours de la Vesdre en assurant à
l’industrie un usage constant de ses eaux.
Il estimait que la population ne manquait pas d’eau potable et, dans sa pensée, l’on
détournait de sa destination initiale le gigantesque ouvrage en créant une distribution «l’eau
pour les habitants de Verviers et des communes voisines.
Un procès fut intenté par des industriels de la vallée à l’Etat belge et à la Ville pour obliger
cette dernière « à supprimer la prise d’eau dans le réservoir de la Gileppe ou payer tels
dommages-intérêts que de droit, indépendamment d’une somme de 300 000 F pour
préjudices passés ».
Le tribunal civil de Verviers tint l’affaire en délibéré. Le 15 février 1882, il rendait son
jugement, déboutant les demandeurs.
Sagement, ceux-ci n’interjetèrent pas appel.
CINQUANTE ANS PLUS TARD
Si le 28 juillet 1878, l’inauguration du barrage avait été favorisée d’un temps idéal, on
célébra son cinquantenaire sous un ciel gris et des averses intermittentes.
Le prince Léopold à la Gileppe
Il pleuvait le soir du samedi 4 août 1928 sur les édifices illuminés de la ville : gare centrale,
hôtel de ville, églises, grand-poste, monuments et squares.
Le dimanche matin, le président du comité des fêtes téléphonait à l’Observatoire et en recevait
de vagues promesses d’amélioration.
Il pleuvait encore à 1 heure, quand les « officiels » et les journalistes quittèrent Verviers pour
se rendre, en auto, à la Gileppe.
La cérémonie principale, devant l’Hôtel des Postes à Verviers, bénéficia d’une accalmie, mais
fut écourtée par crainte d’une nouvelle averse qui se déchaîna au moment des adieux du prince
Léopold. Ainsi, toute la journée fut placée sous le signe de l’eau.
L' exposition:
Depuis huit jours, la ville était en fête. Le 29 juillet, on avait inauguré l’Exposition des Arts et
de l’industrie couvrant plus de neuf mille mètres carrés à l’Athénée, l’Ecole moyenne, l’Ecole
gardienne et les jardins de la Chambre de Commerce et d’industrie.
La cérémonie s’était passée au Salon de l’art ancien, dans le grand préau de l’Athénée tendu de
jute vieil or sur lequel tranchait le velours rouge des draperies.
Le pavillon de la Chambre de Commerce et d’industrie était un chef-d’œuvre d’élégance et de
goût, avec son exposition de modes, ses métiers à tisser, sa documentation variée.
La veille du 5 août, la population apprit avec regret que la princesse Astrid, dont la visite
était promise depuis des mois, n’accompagnerait pas le duc de Brabant qui se rendrait
d’une étape de Clergnon à la Gileppe. Les Verviétois s’étaient réjouis d’acclamer leur
future reine dont le sourire et la grâce étaient populaires dans tout le pays.
Le prince arriverait au barrage à 2 h 30. Et déjà, à 2 h 15, le président du comité
exécutif, l’échevin Kestchgès, ajustant ses lorgnons dans un geste familier, consultait sa
montre, auprès du président du « groupe des fêtes », M. Bronckart, calme et attentif au
moindre détail d’organisation.