Page 97 - le barrage de la gileppe
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L’année suivante, celui-ci avait transmis ses pouvoirs à M. Buisseret, et l’ordre des
travaux était inversé. La connexion Eupen-Gileppe fit l’objet d’une adjudication et l’on
ouvrit les soumissions pour les travaux de la Soor au début de 1950. Ces
derniers devaient s’étendre sur quatre cents jours ouvrables.
Ils commencèrent au mois de juillet 1950. Le tunnel, long de 2478 mètres, fut creusé
simultanément par les deux bouts. S’ouvrant à la côte de 375 mètres sur la Soor, entre la
Croix Zimmerman et le « Pont bleu», (disparu depuis de nombreuses années mais figurant
encore sur les cartes d’état-major) il atteint la côte 315 au Trou Malbrouck où il déverse
ses eaux dans un canal à ciel ouvert qui les achemine dans le lit du ruisseau du Trou
Malbrouck, vers le lac. De forme cylindrique, ce canal a un diamètre de 2,30 mètres. Sa
pente est de 25 millimètres par mètre et il passe à une profondeur de 60 à 70 mètres sous
l’Hertogenwald. Un barrage, d’une hauteur de 8 mètres, est édifié dans le lit de la Soor,
formant un petit réservoir d’où les eaux détournées pénètrent dans le canal souterrain.
Le débit quotidien était estimé à 40 000 m3 avant les travaux. Après l’achèvement du
canal et l’exhaussement du barrage, il pouvait atteindre 78 000 m3.
Les travaux furent poursuivis, sans autre interruption que celle du repos dominical, par
trois équipes d’un total de cent à cent cinquante hommes.
Au début de mai 1951, nous visitâmes le tunnel alors que les mineurs le creusaient
dans des roches schisteuses ou quartzifères, à l’aide de perforateurs- injecteurs, dans un
tintamarre infernal. A travers un nuage de poussière ro¬cheuse, nous apercevions les
ombres falotes des travailleurs se mouvant à la faible lueur des ampoules qui trouaient de
taches blanchâtres le brouillard ambiant. Le spectacle était hallucinant.
En mai 1952, les 2 400 mètres du canal étaient creusés à la perforatrice et parfois à la
dynamite. Nous retraversâmes de bout en bout le tube bétonné, d’une étanchéité absolue,
où la jonction s’était faite, à 1 162 mètres de l'embouchure, avec une précision
millimétrique. C’était du beau travail !
A la sortie du tunnel, au Trou Malbrouck, une vanne automatique est commandée par
les appareils enregistreurs du plan d’eau installés à l’autre extrémité. La force hydraulique
pourrait être utilisée : et une petite station de transformation a été construite.
A mesure que nous avancions dans le souterrain, sautant d’une traverse à l’autre du
rail où roulaient les wagonnets, un disque doré s’élargissait au-dessus du petit barrage de
la Soor. Le soleil rayonnait sur la petite rivière des Fagnes et la forêt, lorsque nous
achevâmes notre promenade de 2 kilomètres et demi à 60 mètres sous terre.
Les travaux s’étaient déroulés sans un seul accident à l’intérieur de la galerie. A leur
début, un éboulement s’était produit sous le Trou Malbrouck, où un ouvrier avait été tué.
Le 1er décembre 1952, le tunnel était complètement achevé.